ENQUETE AU BOUT DU MONDE

Par Jacqueline Féret & Cap'tain Philip est sorti en juin 2022 aux éditions Traboule distribuées par Bod  (260 pages)

Pour commander ce titre cliquer le bandeau orange ci-dessus ou l'onglet "catalogue" en haut à droite de cette page pour accéder au widget correspondant  et mettre le titre choisi dans votre panier".

                                                                ******

Cap'tain Philip est issu d'une famille de marins... des marins parisiens ; une espèce suffisamment rare dont il n'a fait que suivre la voie étroite... mais nécessite néanmoins quelques explications... que "carnets de voyage" recèle...

                                                              ******

Synopsis de Carnets de voyage :

Automne 1938. Mes parents jeunes mariés partaient pour un périple au long cours, de France jusqu’aux mers australes... Plusieurs mois sur un paquebot de ligne entre Caraïbes, Panama, Océanie... Jusqu’à la Nouvelle Calédonie où mon père devait prendre ses fonctions de second lieutenant au commerce...

1958,  j ai 7 ans en banlieue parisienne et je découvre les cicatrices de l’après-guerre.

Mon terrain de jeu,  ce sont les rues de Bécon les Bruyères, l’escalier de mon immeuble, la vie présente et passée de mes voisins ... Dans ce monde si mystérieux des adultes, mon grand père est un guide espiègle et attentif.

                                                                ******

LIRE LES PREMIERES PAGES :

PARIS – Gare de Lyon

– 1995 –

Je viens de passer deux semaines chez mes enfants, Patrick, l’aîné, en Anjou et Françoise, en grande banlieue parisienne. J’ai pu y retrouver mes petits et arrière-petits-enfants dont la compagnie m’a apporté beaucoup de joie.

Maintenant, c’est le retour vers le midi. Ma fille m’a accompagnée à la gare de Lyon et, en attendant l’heure du train, nous prenons un dernier café ensemble à l’une des terrasses encombrées de bagages et de voyageurs sur le départ.

J’ai maintenant 95 ans et c’est ma fille aujourd’hui qui me prodigue conseils et directives pour le voyage. Tandis que je l’écoute avec une attention feinte (ce n’est quand même pas le premier voyage que j’entreprends !), mes yeux s’arrêtent sur une affiche de la revue « Géo » dont les reportages magnifiquement illustrés me transportent souvent dans des contrées connues ou inconnues pour mon plus grand plaisir.

« Madagascar l’île émotion ».

Le cliquettement des panneaux d’horaires, le battement d’ailes d’un pigeon prisonnier de l’immense verrière qui vient de conduire mon regard jusqu’au titre enchanteur et même la voix de ma fille se fondent dans la rumeur composite qui baigne le hall…

Il n’en fallait pas plus pour que mon esprit s’échappe vers Tamatave où réside maintenant Philip, mon plus jeune fils.

C’est dans ce port de l’autre hémisphère que j’ai fait escale en revenant d’Indochine durant la Seconde Guerre mondiale et j’y suis retournée il n’y a pas si longtemps voir Philip.

Accompagné par l’œil indulgent de ma fille, je me précipite au stand de presse voisin pour me procurer le magazine propre à transformer ces quelques heures de confortable roulis vers le sud de la France, en un voyage plus aventureux.

******

Je suis né à la veille d’un été torride, celui de 1952, et l’on m’a donc prénommé Philip (le maréchal était mort en prison l’année précédente, n’y voyons là qu’une coïncidence), Thierry, comme un grand frère qui n’a vécu que quelques mois, René enfin comme mon parrain qui était ingénieur aux chemins de fer et incidemment comme mon père.

Mon grand-père, lui, se prénommait André. Il m’a appris l’allemand et les échecs. Il est mort quand je venais d’avoir huit ans. Mais il a longtemps marché à mes côtés pendant que le monde changeait autour de nous.

Papa et sa grande sœur Suzy étaient déjà nés quand mon grand-père a été blessé dans les tranchées pendant la grande vorace. Peu après, ma grand-mère est partie avec un aviateur fraîchement décoré pour avoir mitraillé les pauvres types d’en face depuis son biplan.

Suzy était très belle. Je ne le sais que par de vieilles photos sur lesquelles on la voit jouer avec Gery, son petit garçon et mon frère aîné sur la plage du Lavandou en 1942, l’année où elle est entrée dans la résistance.

Elle a été arrêtée et exécutée l’année suivante en Italie. C’est donc mon grand-père qui, après avoir élevé seul Papa et Suzy, a élevé son petit fils Gery dans un modeste appartement de la rue Danton à Levallois-Perret, à deux pas de la porte Champerret.

Par les hasards successifs propres au conflit qui embrasait alors le monde entier, Papa s’est retrouvé pompier dans le XVIIe arrondissement de Paris. Toujours à deux pas, donc, de la rue Danton, et bientôt sans logement, lorsque, un beau matin, l’immeuble où il avait installé sa petite famille, de l’autre côté de la Seine, tout près de la gare de Bécon-les-Bruyères, fut éventré par une bombe américaine.

Alors que s’achève l’année 1943, les voilà donc tous les trois, grand-père, fils et petit-fils, un peu à l’étroit, trois étages au-dessus de la boucherie chevaline du 29 rue Danton à Levallois-Perret. D’autant plus à l’étroit que le grand-père est compositeur et que par contrecoup, le petit appartement est encombré d’instruments de musique de toutes sortes…

                                                       *******